Couverture vaccinale BCG en médecine libérale : premières données chez le nourrisson, sept mois après la levée de l’obligation vaccinale en FranceBCG vaccine coverage in private medical practice: First data in children below two years old, seven months after the end of compulsory vaccination in France
Introduction
La France est considérée comme un pays à faible incidence de tuberculose. En 2006, 5336 cas de tuberculose maladie y ont été déclarés, soit un taux d’incidence de 8,5 cas par 105 habitants [1]. Néanmoins, cette incidence est élevée dans certains groupes de population et dans certaines zones géographiques, avec notamment un risque plus élevé chez les personnes nées à l’étranger (45 % des cas) et en Île-de-France (37 % des cas) ou en Guyane [1]. D’autres groupes particulièrement affectés sont les personnes en état de précarité socioéconomique, notamment les personnes sans domicile fixe.
L’incidence élevée de la tuberculose dans certains groupes a conduit à une réflexion sur la politique vaccinale par le BCG en France. Suite aux conclusions de deux expertises réalisées en 2004 [2] et 2006 [3], le Conseil supérieur d’hygiène publique de France (CSHPF) proposait le ciblage de la vaccination BCG pour les enfants appartenant aux groupes à risque. Ces avis s’appuyaient sur l’expérience d’autres pays européens [4] et, notamment, sur celle de la Suède où l’incidence de la tuberculose s’était maintenue à des niveaux acceptables après le remplacement d’une politique de vaccination systématique des nouveau-nés par une vaccination sélective des enfants à risque élevé [5]. La proposition du CSHPF survenait alors que la vaccination par multipuncture (Monovax®) n’était plus disponible depuis janvier 2006, ne laissant sur le marché que le vaccin intradermique, considéré comme plus difficile à manier et avec plus d’effets indésirables que le vaccin Monovax® [6].
Le faible risque de tuberculose dans une majorité de la population, le risque plus élevé d’effets indésirables avec le nouveau vaccin et les difficultés techniques de la vaccination par voie intradermique pour les médecins n’en ayant pas l’habitude expliquaient certainement la réticence à vacciner de la part des médecins. Ces réticences se sont traduites par une chute de la couverture vaccinale BCG de plus de 50 % [7], même avant la suspension de l’obligation vaccinale.
Cette suspension intervenue en juillet 2007 a été remplacée par une recommandation forte de vaccination des enfants les plus exposés au risque de tuberculose :
- •
les enfants nés ou dont au moins l’un des parents est originaire d’un pays de forte endémie tuberculeuse ;
- •
les enfants devant séjourner au moins un mois d’affilée dans l’un de ces pays ;
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les enfants ayant des antécédents familiaux de tuberculose (collatéraux ou ascendants directs) ;
- •
les enfants résidant en IDF ou en Guyane ;
- •
les enfants dans toute situation jugée par le médecin à risque d’exposition au bacille tuberculeux, notamment enfants vivant dans des conditions de logement ou socioéconomiques défavorables ou précaires ou en contact régulier avec des adultes originaires d’un pays de forte endémie.
Cette nouvelle politique vaccinale ciblée sur les enfants à risque constituait une bonne option, à condition que les CV restent élevées dans ces populations d’enfants [8]. Or il n’existe pas aujourd’hui d’outils permettant de mesurer en routine la CV chez le nourrisson ciblé par la recommandation, puisque les certificats de santé du neuvième et du 24e mois, qui sont la principale source de ces estimations chez le nourrisson, ne contiennent pas d’informations sur l’appartenance à un groupe à risque de tuberculose [9]. Par conséquent, nous avons mené une enquête en médecine libérale dont l’objectif principal a été d’estimer la CV BCG chez les enfants nés après la levée de l’obligation vaccinale et ciblés par les nouvelles recommandations. Les objectifs secondaires ont été de mesurer cette couverture chez les enfants nés entre l’arrêt de commercialisation du BCG par multipuncture et la suspension de l’obligation vaccinale, et de décrire les pratiques des médecins et l’attitude des parents vis-à-vis de la vaccination BCG. L’ensemble des résultats de cette étude est disponible en ligne sur le site de l’institut de veille sanitaire (InVS) (www.invs.sante.fr).
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Population d’étude
La population concernée par cette enquête correspond aux 4370 médecins (essentiellement médecins généralistes et pédiatres) abonnés du réseau Infovac-France (dont 900 en IDF). Ce réseau a comme objectif d’informer ses abonnés sur les évolutions récentes dans le champ de la vaccinologie et de répondre de manière très réactive à leurs interrogations concernant leur pratique vaccinale (www.infovac.fr). Ces médecins ont reçu le questionnaire par courriel le 5 février 2008.
Des enfants de deux
Caractéristiques générales des médecins et des enfants (Tableau 1)
Parmi les 4372 médecins sollicités entre le 5 février et le 16 mars 2008 (dont 897 exerçaient en IDF, soit 10 %), 285 (6,5 %), dont 279 pédiatres et généralistes, ont répondu à l’enquête après plusieurs relances (dont 92 exerçaient en IDF, soit 32 % de l’échantillon). Il s’agissait en majorité de pédiatres (67 %) et de praticiens de sexe féminin (72 %). Parmi ces médecins, 201 (70 %) exerçaient en libéral (107 en libéral exclusif, 94 en mixte libéral plus salarié), 65 (23 %) exerçaient
Discussion
Ces résultats constituent les premières estimations de CV par le BCG suite à la suspension de l’obligation vaccinale. Il s’agit cependant d’une enquête basée sur un échantillon de convenance, que nous avons menée afin d’informer rapidement les pouvoirs publics sur l’impact de cette mesure, en attendant la réalisation d’enquêtes par sondage aléatoire plus fiables mais plus difficiles à mettre en place. L’interprétation de ces résultats doit donc tenir compte de ce contexte et doit rester
Conclusion
Notre enquête a montré, d’une part, des CV insuffisantes en secteur libéral et, d’autre part, des résultats encourageants en matière d’acceptation par les médecins et les familles de la nouvelle politique vaccinale BCG. De nouvelles enquêtes par sondage aléatoire permettront de confirmer ces premières données et d’estimer la CV chez les enfants suivis en PMI. La modification des certificats de santé de l’enfant permettant d’identifier les enfants à risque et de mesurer en routine la CV BCG
Conflits d’intérêts
Aucun.
Remerciements
Nous remercions l’ensemble des médecins du réseau Infovac-France qui ont bien voulu donner de leur temps pour participer à cette enquête. Merci à Yann Le Strat pour ses avis statistiques. Nous remercions également Sadia Tortorelli (ACTIV) qui a contribué au suivi de la collecte des données.
Références (11)
- et al.
Enquête sur les effets secondaires locaux du vaccin intradermique BCG-SSI chez l’enfant de moins de six ans en France
Arch Pediatr
(2007) Estimation de l’impact épidémiologique de différentes options de vaccination BCG en France
Rev Epidemiol Sante Publique
(2005)- et al.
Les cas de tuberculose maladie déclarés en France en 2006
Bull Epidemiol Hebd
(2008) Tuberculose : place de la vaccination dans la maîtrise de la maladie
(2004)- Audition publique. Levée de l’obligation vaccinale par le BCG chez les enfants : synthèse des recommandations. Document...
Cited by (19)
Vaccination coverage and socioeconomic determinants of BCG vaccination in children before 3 months: Results of the Elfe cohort study, 2011
2016, Revue d'Epidemiologie et de Sante PubliqueDo selective immunisation against tuberculosis and hepatitis B reach the targeted populations? A nationwide register-based study evaluating the recommendations in the Norwegian Childhood Immunisation Programme
2016, VaccineCitation Excerpt :After changing from universal to selective BCG immunisation in Sweden in 1975, an increased incidence of TB among children with foreign born parents was observed [29]. Also in France, the coverage decreased when targeted BCG vaccination replaced the universal programme [19,30]. We found, in contrast, the coverage among infants with parents from high-burden countries to remain unchanged after the switch to selective BCG immunisation.
BCG vaccination: Survey among children less than 5years of age in an emergency department
2014, Archives de PediatrieFamily history of immigration from a tuberculosis endemic country and low family income are associated with a higher BCG vaccination coverage in Ile-de-France region, France
2013, VaccineCitation Excerpt :Following these changes, estimation of BCG vaccination coverage of children targeted by the new recommendations was needed. In Ile-de-France, as all children were targeted by the new policy, administrative data, complemented with data from surveys, could be used to monitor the overall vaccination coverage which was shown to progressively increase from about 50% in children born in 2007 to about 80% in children born in 2011 [5–8]. However, within this region, no specific data were available for the specific group of children who, beyond residing in Ile-de-France, present additional risk factors mainly linked to being born to a family originating from a highly tuberculosis endemic country.
Vaccination coverage in 6-year-old preschool children, France, 2005-2006
2013, Archives de Pediatrie